Les SELAS doivent rentrer dans les clous

Le décret sur les SPF-PL interdit désormais aux pharmaciens investisseurs de détenir la majorité du capital d’une officine. Les 300 Selas qui sont dans cette configuration risquent de se trouver dans une impasse. Déjà, une association de pharmaciens envisage un recours devant le Conseil d’État.

 

Le texte sur les sociétés de participations financières des professions libérales, paru au Journal officielle 6 juin dernier jette un pavé dans la mare puisqu’il « réserve la majorité du capital social d’une SEL de pharmaciens d’officine à des professionnels qui exercent effectivement dans cette société ».Or, jusque-là, en vertu de la loi Murcefde 2001 et de la loi sur les SEL de 2005 dite loi Dutreil2, un pharmacien non-exploitant – dit investisseur – pouvait détenir la majorité du capital d’une SELAS (société d’excercice libéral par actions simplifiées), à condition que le titulaire ait au moins 5 % du capital ainsi que la majorité des droits de vote.

 Deux ans pour être en conformité avec le décret

 Ce profil de pharmacies n’est pas un cas isolé. « Il existe environ 300 Selas de pharmacies en France détenues majoritairement par un pharmacien investisseur »,explique Stephane Lang, président du Collectif des SEL de pharmaciens. Le cabinet d’avocats Laboureix, Foyard et Associés (LFA) traite de ces structures environ une fois par an. « Le plus souvent, il s’agit de titulaires qui ont fini de rembourser l’emprunt de leur pharmacie et souhaitent investir dans une nouvelle officine tout en mettant le pied à l’étrier à un adjoint qui n’a pas la capacité financière de racheter une pharmacie »,explique Maître Thierry Foyard, avocat au sein de ce cabinet.

Or, ces sociétés n’ont que deux ans pour se mettre en conformité avec le décret. « Il met ces pharmaciens exploitants minoritaires dans une position très délicate car beaucoup ne pourront pas racheter les parts de leur investisseur »,alerte Stéphane Lang. Sans compter un effet psychologique dévastateur. « Des pharmaciens minoritaires seront contraints de redevenir adjoints. Ils le vivront comme un retour en arrière »,précise Maître Laurent Courtin, du cabinet LFA. Quelques jours avant la parution du décret, cet avocat travaillait sur le cas d’une Selas, dont un investisseur devait détenir 70 % du capital. « Au dernier moment, l’investisseur a dû baisser son pourcentage en capital tout en investissant le même montant car le pharmacien exerçant ne pouvait pas investir davantage. »L’investisseur y avait intérêt : titulaire d’une première pharmacie, il investissait dans la seule autre pharmacie de la commune. Mais tous ne seront pas dans cette configuration.

Un risque de vente forcée de la pharmacie

Alors, quelles sont les solutions possibles ?

– Le pharmacien minoritaire achète les parts de l’investisseur : cette solution est crédible dans le cas d’une officine faiblement valorisée ou si l’excerçant ne doit pas racheter 46 % du capital (dans le cas où il n’a que 5 % des parts). « Ils vont se heurter au problème de financement car, aux yeux des banques, beaucoup de ces titulaires n’auront pas suffisemment de garanties »,explique Laurent Courtin.

-Trouver un autre associé exploitant qui accepte de reprendre – au moins en partie – les parts du pharmacien investisseur. « Dans ce cas, la pharmacie doit avoir une capacité financière suffisante pour rémunérer deux exploitants »,avertit l’avocat.

Conclusion : les négociations entre exploitant et investisseur sur la valorisation de la pharmacie ont toutes les chances d’être âpres et de se traduire par une vente forcée en cas de blocage. Première conséquence ? « Il risque d’y avoir plus de ventes de pharmacies, à des prix réduits, car les vendeurs seront très pressés »,s’inquiète Maître Courtin. Plus d’offres, mais peut-être moins de jeunes acheteurs, dans un contexte de vieillissement de la population des pharmaciens. « Des investisseurs ne pourront plus aider certains jeunes officinaux à s’installer qui ne veulent pas ou ne peuvent pas détenir au moins 51 % du capital »,ajoute Stéphane Lang. Ce titulaire, investisseur dans deux Selas, ne compte pas renoncer. « C’est une quasi-spoliation, ces sociétés sont nées en toute légalité. »Il prépare, au nom du Collectif, un recours devant le Conseil d’État.

« Je ne peux pas racheter 46 % des parts »

 À 26 ans, Carol Davidson est devenue titulaire d’une officine de 1,8 millions d’euros, à Strasbourg. « En n’investissant que 5 % du capital, je suis devenue titulaire sans prendre de risques financiers ». C’était il y a quatre ans. À l’époque, le chiffre d’affaires de la pharmacie était en chute libre. Stéphane Lang, titulaire d’une officine dans le Bas-Rhin et investisseur dans une autre pharmacie, prend 95 % des parts de cette officine « pour capitaliser et aider un jeune à s’installer ».Le décret risque de mettre cette jeune pharmacienne dans une impasse. « Je viens d’acheter une maison. Je ne peux pas racheter 46 % des parts. »Soit l’équivalent de 900 000 €.

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